Didier Jousse « Mon souci est de faire réfléchir les enfants »

L’équipe de Racingfoot.fr est allée à la rencontre de Didier Jousse, éducateur u13 Elite Régional. Au club depuis 33 ans, il évoque son parcours, ses souvenirs et se confie sur sa façon d’entraîner ses jeunes pousses ciel et blanc.

Bonjour Didier, peux-tu te présenter aux supporters du Racing ?

Je suis entré au club en 1986. Mon fils jouait en débutant à cette époque. Les éducateurs voyant que j’étais toujours présent m’ont demandé si je voulais leur donner un « coup de main ». J’ai dit oui et quelques années plus tard, le responsable sportif de l’époque m’a incité à passer mes diplômes. C’est ce que j’ai fait, puis assez vite on m’a confié « l’équipe fanion » de foot réduit, successivement les moins de 11 ans, les benjamins et aujourd’hui donc les u13.

Je suis ici depuis 33 ans, j’ai vu passer énormément de monde, joueurs, éducateurs, présidents, dirigeants…

Quelles sont les « valeurs Racing » que tu as cherché à préserver avec le temps ou à faire évoluer ?

Les notions de fair-play, de respect sont pour moi les valeurs qui ne doivent pas bouger, on ne parle pas forcément de l’aspect foot, mais plutôt des valeurs morales.

Le respect entre soi, dans le club, avec les adversaires, avec toutes les personnes qui tournent autour du Racing et du football. On représente l’image d’un club qui a beaucoup revendiqué ces valeurs. Et c’est ce qui m’a assez marqué à mes débuts, l’image d’un club qui ne négocie pas sur les valeurs et j’ai toujours fait en sorte de préserver cela.

En ce qui concerne le terrain, il y a eu des époques différentes. Le football a beaucoup évolué en trente ans et les principes de « l’enseignement football » également.

Une valeur qui reste primordiale à mes yeux est la transmission. J’aime ce qui se passe aujourd’hui dans ce club, il y a beaucoup d’anciens racingmen qui sont de retour au bercail !

Quand je suis arrivé au club, ce qui m’avait marqué c’était la fidélité des éducateurs, le rôle et le respect des « anciens » ainsi que le lien fort avec les couleurs ciel et blanc.

Quand je vois cette saison tous ces « jeunes » anciens revenir sous la casquette d’éducateur, je sens qu’ils ont été marqués par ces « valeurs Racing » sur et en-dehors du terrain. Je pense qu’aujourd’hui, c’est la meilleure nouvelle pour les jeunes joueurs et le club.

Les u13 A de Didier Jousse en déplacement à Reims en janvier

Tu as connu le Racing avec une identité club, des principes de jeu, une éducation footballistique. Avec ton expérience, sur quoi insistes-tu avec les joueurs que tu as actuellement ?

J’ai beaucoup évolué et encore aujourd’hui j’essaye de rester au niveau, j’ai ainsi toujours retravaillé mes séances, sans jamais me reposer sur mes acquis.

Je pense qu’on insistait beaucoup sur le collectif, donner son ballon, soigner le beau jeu même dans les petites catégories.

Peu à peu j’ai pas mal évolué sur ce sujet en recentrant le travail sur le développement individuel de chaque garçon. Ne surtout pas brider les qualités naturelles qui sont les leurs.

Au fil des années, à travers l’évolution du foot, de mon travail et des exercices, il a fallu apporter des modifications dans le fonctionnement.

Ce qui n’a pas ou peu bougé, c’est mon souci de faire réfléchir les enfants. Il faut qu’ils se posent des questions, qu’ils comprennent qu’ils sont les maîtres du jeu. C’est aussi à eux de trouver les solutions, c’est très important et je suis particulièrement content de voir que ces préoccupations sont au cœur du projet que Guillaume Norbert et Smaïl Bouabdellah souhaitent mettre en place.

La vitesse est devenue centrale dans le foot, dans les ateliers, les exercices, on oblige les garçons à penser vite, à agir vite, à enchaîner plus vite. C’est une évolution qui m’a particulièrement marquée.

Pour conclure, et pour en revenir à ce que je disais au début de ma réponse, le collectif reste le carcan dans lequel doivent se développer les qualités individuelles.

Ne pas renier nos valeurs quel qu’en soient les raisons (souvent mauvaises), le club reste le plus important, c’est notre famille « football » en quelque sorte et ensemble on est « fort ».

Tu l’as dit précédemment, tu es en charge de « l’équipe fanion » du foot réduit. En u13, les joueurs disputent leur dernière saison sur des « petits terrains » avant de passer sur grand terrain, comment les prépares-tu à faire le grand saut entre le foot réduit et le foot à onze ?

Je ne suis pas obsédé par le passage au foot à onze. Je fais quand même quelques matches sur grand terrain dans la saison, mais je pars du principe que si on a réussi à faire progresser les garçons individuellement, les rendre costauds dans leur expression individuelle, alors il sera beaucoup plus simple pour les éducateurs à onze d’arriver très vite à une mise en place.

Le faire trop tôt, c’est mettre en difficulté certains jeunes tactiquement et physiquement. Si les rencontres ne sont pas équilibrées, ils seront encore plus en difficulté que dans le foot réduit.

Le foot réduit permet aux joueurs de toucher plus souvent le ballon, ils se développent donc beaucoup plus individuellement. C’est cela qui leur permettra de prendre rapidement leur marque sur grand terrain.

Puis il ne faut pas oublier une chose, les jeunes aujourd’hui contrairement à mon époque regardent beaucoup de matchs à la télévision. Certains connaissent les organisations de jeu avant même qu’un éducateur leur en parle, même s’ils n’en connaissent pas toutes les subtilités. Je trouve que les jeunes maintenant font les choses assez naturellement et sont avancés tactiquement parlant. Parfois ça en devient même surprenant.

Au final, même si je ne suis pas convaincu par la nécessité absolue de passer à 11 pour nos U13, on s’adaptera, peut être que la solution consisterait à faire cohabiter les deux pratiques, conserver un critérium à 8 sur une demi-saison et une seconde partie de saison à 11 ?

Tu as du vivre énormément d’émotions en trente-trois ans au club, quels sont tes meilleurs souvenirs avec le Racing ?

Le souvenir qui me vient tout de suite c’est le lever de rideau que l’on a pu faire avec les jeunes durant la coupe du monde 1998 à Montpellier.

On avait gagné l’équivalent de la coupe des Hauts-de-Seine et nous avions représenté le district 92 avant un huitième de finale de Coupe du Monde 1998 entre l’Allemagne et le Mexique. Je m’en souviens parce que les joueurs allemands étaient venus regarder les petits jouer. C’était quelques heures avant leur match, mais c’est une image forte qui me reste en tête. On a ensuite regardé le match en tribune.

J’ai énormément de souvenirs des tournois car durant toutes ces saisons j’ai eu l’opportunité de visiter de nombreuses régions.

Enfin, bien entendu, je garde le souvenir de nombreux joueurs que j’ai eu la chance d’entraîner, certains sont devenus professionnels et beaucoup d’autres, parfois au moins aussi bons, ont suivi d’autres voies.

C’est une bonne transition parce que la prochaine question concerne ces joueurs que tu as eu et qui ont réussi à devenir professionnels. Qu’est-ce que cela représente pour toi de les voir à un tel niveau aujourd’hui ?

Ca représente une fierté, mais il faut rester modeste. Nous avons sans doute apporté des choses aux joueurs, mais assez souvent nous ne les avons qu’une seule année avant qu’ils aient d’autres coachs, nous avons donc été de passage dans leur parcours.

Mais quelle satisfaction quand certains d’entre eux n’oublient pas leur premier club, leurs premiers éducateurs, c’est que nous les avons marqués sans forcément s’en rendre compte.

Steven Nzonzi de retour au club l’année dernière n’a pas manqué de venir saluer Didier Jousse

Un dernier mot pour les supporters du Racing ?

Les remercier pour leur fidélité. Remercier les anciens et les nouveaux pour leur investissement auprès du club.

A tous les supporters et suiveurs du Racing : n’hésitez pas à venir voir les plus jeunes le samedi ou le dimanche. Venez plus tôt le samedi quand nos seniors jouent à domicile. On vous accueillera avec plaisir et vous verrez, peut-être, les futurs joueurs de l’équipe première du club.

Avec les supporters je ne veux surtout pas oublier les parents qui nous accompagnent, souvent nous soutiennent et parfois même nous remercient pour notre implication. En 30 ans j’ai eu l’opportunité de rencontrer de belles personnes, merci à eux !

Pour finir, à tous les joueurs, éducateurs, dirigeants, amoureux du club, suiveurs et supporters : Allez Racing… et allez les « Ciel et Blanc ».

Article par Dalil Bouchakour